Le Skate Punk – Histoire d’une contre culture américaine

Pour la toute première fois, le skateboard a été reconnu discipline olympique et sera au programme des prochains Jeux de Tokyo en 2020. Si certains le déplorent, comme Tony Alva (premier Champion du Monde de Skate de l’histoire en 1977), c’est tout simplement parce qu’avant même d’être un sport, le skate représente surtout un style de vie, un état d’esprit, le symbole de l’indépendance et d’une contre-culture. Une singularité qu’il partage avec le Punk Rock, genre musical qui a connu son expansion sensiblement à la même période. Si aujourd’hui, l’époque a bien changé, le Punk a durant deux décennies constitué la bande son principale des skaters américains, enfantant d’un sous-genre musical appelé le « Skate Punk ».

Aux débuts des années 50, des surfers américains ont eu l’idée de créer une planche à roulettes pour continuer à pratiquer la glisse lorsque les conditions météorologiques ne leur permettaient pas de s’attaquer aux vagues. Ces surfeurs de l’asphalte se retrouvaient alors exclusivement en Californie et à Hawaï. A partir de 1962, la société « Patterson Forbes » produit les tous premiers skateboards de fabrication industrielle. Au cours cette période, l’Amérique est prospère et les choses s’accélèrent. « The Quaterly Skateboarder », le premier magazine de skate est publié en 1964. Les premières marques de vêtements spécialisés dans le skate font également leur apparition. C’est ainsi que la marque « Vans » voit le jour en 1966. Dans les années 70, les planches se perfectionnent, les magazines dédiés au skate se multiplient et le premier skatepark est créé à Jacksonville en Floride. Dans le même temps, le street skateboarding se développe progressivement. Si vous voulez en savoir plus sur cette période, je vous conseille de visionner l’excellent film de 2005 « Les Seigneurs de Dogtown », qui se déroule à cette époque et qui relate l’histoire des Z-boys, un groupe de jeunes californiens qui sont aujourd’hui devenus des légendes du skateboard.

En 1981, le magazine “Thrasher” fait son apparition. Il devient la référence pour tous les adeptes du street skateboarding et participera à faire du skate un phénomène de contre culture qui s’étend à la musique et à la mode vestimentaire. Les premiers skateshops ouvrent et la popularité du skate devient de plus en plus importante. L’apparition des VHS et l’esprit DIY des skaters permettent de voir arriver sur le marché de nombreuses vidéos de skate qui contribuent encore un peu plus à la popularisation du mouvement. Ces vidéos véhiculent un esprit de rébellion et une bande-son qui deviennent indissociables du phénomène.

Le skate punk émerge ainsi en Californie au début des années 1980. Les premiers groupes à porter cette étiquette sont Black Flag, The Big Boys, Agent Orange, Minor Threat, Suicidal Tendancies et Bad Religion. Ces groupes partagent avec les skaters de nombreux points communs : une culture de l’underground, une volonté d’indépendance, un esprit DIY et une tendance à la rebellion contre l’autorité. Cette première vague du skate punk est surtout composée de groupes lorgnant du côté du hardcore. Le premier album de Black Flag : « Damaged » sorti en 1981 s’impose comme un des albums cultes du Punk grâce à l’énergie du chanteur Henri Rollins et aux riffs de guitare de Greg Ginn. Le thème de prédiction du groupe tourne autour du manque de perspective des jeunes de la classe moyenne. Black Flag est considéré aujourd’hui comme le créateur du mouvement hardcore américain. Le groupe finit par se saborder en 1986, ne se reconnaissant pas lui même dans la dérive d’un mouvement trash skinhead qu’ils avaient bien malgré eux contribué à créer.

Au début des années 90, certains skateboarders arrivent désormais à vivre de leur discipline et d’autres comme Tony Hawk deviennent même des stars planétaires. Exit le hardcore, Le skate punk devient plus mélodique avec des groupes comme NOFX, Rancid, Pennywise ou No Use for a Name. Le courant donne aussi son nom désormais à une mode vestimentaire.

En 1994, l’album de The Offspring « Smash » cartonne dans le bacs et son single « Come Out & Play » est matraqué sur toutes les radios grand public. Puis, c’est autour de Green Day, la même année, de prendre en otage les ondes radio avec son album à succès « Dookie ». Ces deux albums contiennent chacun de nombreux hits et sont les principaux artisans de l’introduction du punk rock californien au grand public. Dans leur sillon, d’autres groupes vont en profiter et rencontrer un succès international : Rancid avec « … And Out Come the Wolves », N.O.F.X avec « Punk in Drublic » et Bad Religion avec « Stranger Than Fiction ». Contrairement aux autres groupes des années 90 labélisés « Skate Punk », le groupe N.O.F.X a toujours refusé de signer sur un label majeur et de diffuser leur clip sur MTV, préservant ainsi, selon leur point de vue, une certaine intégrité.

A la fin des années 90, des jeux vidéos comme « Tony Hawk Pro Skater » finissent d’installer le skate dans tous les foyers et participent à véhiculer la bande son du Skate Punk devenu un courant majeur des années 90. En 1999, Sega sort le jeu « Crazy Taxi » dont la bande-son est composée exclusivement de chansons de The Offspring et Bad Religion.
Cette fin de siècle, voit apparaître la troisième vague du Skate Punk avec comme fer de lance : Blink-182. On parle maintenant de Punk Pop. Les thèmes sont toujours les mêmes mais traités de façon beaucoup plus légère. L’humour potache est de mise ! L’album « Enema of The State », publié en 1999, se vend à 15 millions d’exemplaires dans le monde entier. Blink-182 joue dans des arènes à guichet fermé. En 2001, le skate punk canadien de Sum 41 s’inscrit dans la même lignée et squatte les antennes de MTV avec les singles « Fat Lip », « Still Waiting » et « In Too Deep ».

Par la suite, le mouvement Skate Punk s’est estompé petit à petit. Le rock a progressivement laissé place au Hip-Hop dans les préférences des skaters de la jeune génération. Avec le succès et l’avènement des réseaux sociaux, le skate est aussi malheureusement parfois devenu une discipline contaminée par les « poseurs » et a subi une certaine aseptisation du mouvement. La décennie 2010 a quand même vu l’émergence de certains groupes qui continuent à véhiculé cet esprit « Skate Punk ». On peut citer Trash Talk, Fidlar, Trash Boat et Cerebral Ballzy.

On termine en musique avec une sélection de chansons « Skate Punk » à travers les époques.

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